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Vous souvenez-vous, il y a un an, naissait dans la joie et la liesse un nouveau fanzine qui s'était donné pour but de nous faire découvrir des textes orientés fantastique bien sur mais surtout et avant tout dont l’action se déroule a la fin du XIXème siècle, période chère a Estelle Valls de Gomis, fondatrice du Calepin Jaune. Installons-nous dans la machine à remonter le temps et reculons nos montres de deux cents ans.

Le voyage commence avec une présentation par Héloïse Jacob du critique littéraire et écrivain Jean Lorrain. Héloïse nous parle un peu de l’homme mais surtout de ces écrits sur les masques où tout n’est que suggestion. Cette présentation introduit la nouvelle L’un d’eux parue en 1900 dans le recueil de Jean Lorrain intitulé Histoires de masques où le narrateur fait l’étrange rencontre d’un personnage masqué. Gardons nos masques et nos loups pour un Conte Vénitien de Malaïka Macumi où la triste narratrice passe quelques jours de repos à Venise. Au cours d’un bal masqué organisé par son hôtesse elle va découvrir ce qui se cache derrière le personnage d’un étrange tableau. Un texte qui nous plonge directement dans le faste de Venise et de ses bals masqués de la fin du XIXème siècle. A croire que Malaïka fut une Vénitienne de cette époque ou toutes les rencontres etaient possible. Ce ne sont pas les masques qui sont inquiétants dans Le Dernier Acte de Morgane Guingouain mais les mannequins d’une manufacture de tissage désaffectée. Une orgie macabre a lieu au centre même de la manufacture, orchestrée par un être assoiffé de sang. Morgane nous décrit des scènes d’orgie sexuelle sans tomber dans le scabreux et tout en nous donnant a ressentir toute l’horreur et la peur de la narratrice. Pour nous remettre des horreurs que nous venons de vivre, voici une petite ballade au clair de lune dans un vieux cimetière où Olivier Pietroy va à la rencontre de sa Belle Endormie grâce a un merveilleux poème qui donne envie d’embrasser la gisante qui nous tend les lèvres. Il fait toujours nuit. Et passer la nuit dans une forêt, même celle de notre enfance n’est pas sans risque. L’imagination prend le dessus de la raison ; le Pic de Neuschwanstein, pourtant vide en 1868, va réserver une surprise au jeune bidasse perdu de Thomas Dumoulin. A la lecture de cette nouvelle on peut facilement imaginer qu’au cours d’une promenade en forêt notre jeune auteur a pu se perdre lui aussi pour si bien retranscrire ce qui se passe dans l’esprit de quelqu’un d’égaré en foret. Mais le temps passe, voici l’heure du sabbat, Le Sabbat des éphémères sous la plume à l’apparence si douce d’Hérélys Deslandes mais trempée dans l’encrier de sang des damnés, dont l’âme se nourrit de la mort de petites filles qui danseront pour l’éternité. Le voyage dans le temps, un rêve inaccessible qui a inspirer de nombreux auteurs et notamment Max Philippe Morel. Le narrateur de Souvenir d’Uchronie a la possibilité de visiter l’avenir mais le premier saut qui l’amène dans notre contemporalité lui fait tellement peur qu’il préfère retourner dans son temps et tout faire pour empêcher que le XXème siècle soit ce qu’il a découvert. Avec le texte clôturant ce Calepin Jaune hivernal c’est une nouvelle formule qui est inaugurée : le feuilleton. La Chaîne d’Emmanuelle Maia ne nous délivrera son secret que dans le prochain numéro (à paraître au mois de mars). Trois mois pour imaginer quel maléfice habite la maison où se passe l’action, trois mois pour se raconter l’histoire du vieillard alité dont le narrateur doit s’occuper jours et nuits. Emmanuelle a su à merveille ménager ses effets, doucement elle fait naître l’envie de savoir, de connaître toute l’histoire sans trop en révéler les tenants, simplement en nous parlant du morne quotidien de ce grabataire. Mais pour savoir, savoir la suite, l’histoire, il faudra soit soudoyer l’auteur (chose impossible a moins d’être sa mascotte ou d’écrire un bon commentaire de son texte), soit plus simple : s’armer de patience et attendre le Calepin Jaune cinquième du nom.

Les auteurs du Calepin Jaune ont sûrement une machine à remonter le temps pour si bien nous conter le XIXème siècle. Et que dire des illustrateurs tel que Jaime et ses troublantes photos ou encore la superbe vampire de Fablyrr, les masques de Cyril Carau, le corset émouvant de Lucile Le Marchand, le mystérieux Lord de Polidori et bien sur le superbe dandy d’Estelle Valls de Gomis sans oublier la mystérieuse Domello imposée par Emmanuelle Maia pour illustrer sa nouvelle, qui, par leurs dessins et photos, représentent la merveilleuse époque où tout était encore possible.